La Chanson des Fusils – Gaston COUTE

Gaston Couté, chansonnier anarchiste (1880 – 1911), a écrit de nombreux poèmes et chansons, qu’on peut retrouver dans la récente réédition des oeuvres complètes que viennent de réaliser les Éditions libertaires.

On y trouve des textes antimilitaristes connus tels Le Fondeur de canons, Nos vingt ans, La complainte des ramasseux d’morts, Les Conscrits, encore chantés aujourd’hui.

« La Chanson des fusils », publiée dans le Pioupiou de l’Yonne n° 13 d’octobre 1910, n’a jamais été chantée en voici le texte :

Nous étions fiers d’avoir vingt ans
Pour offrir aux glèbes augustes
La foi de nos cœurs éclatants
Et l’ardeur de nos bras robustes ;
Mais, voila qu’on nous fait quitter
Notre clair sillon de bonté
Pour nous mettre en ces enclos ternes
Que l’on appelle des casernes.
REFRAIN :
En nos mains de semeurs de blé
Dont on voyait hier voler
Les gestes d’amour sur la plaine,
En nos mains de semeurs de blé
On a mis des outils de haine…
O fusils qu’on nous mit en mains,
Fusils, qui tuerez-vous demain ?
Notre front qui ne s’est baisse
Encor que par-devant la Terre
Bouge, en sentant, sur lui, peser
La discipline militaire ;
Mais s’il bouge trop, notre front !
Combien d’entre nous tomberont
Par un matin de fusillade
Sous les balles des camarades.
REFRAIN
Nos yeux regardent sans courroux
Les gâs dont les tendresses neuves
S’essèment en gais rendez-vous
La-bas, sur l’autre bord du fleuve
Mais un jour de soleil sanglant
Ah ! combien de pauvres galants
Ayant un cœur pareil au notre
Coucherons-nous dans les épeautres ?
REFRAIN
Nous trinquons dans les vieux faubourgs
Avec nos frères des usines !
Mais si la grève éclate un jour
Il faudra qu’on les assassine !
Hélas ! combien de travailleurs
Auront-ils a compter des leurs
Sur les paves rougis des villes
Après nos charges imbéciles ?
REFRAIN
Mais, en nos âmes de vingt ans,
Gronde une révolte unanime :
Nous ne voulons pas plus longtemps
Être des tacherons du crime !
Pourtant, s’il faut encore avant
De jeter nos armes au vent
Lâcher leur décharge terrible,
Nous avons fait choix de nos cibles
REFRAIN :
En nos mains de semeurs de blé
Dont on voyait hier voler
Les gestes d’amour sur la plaine,
En nos mains de semeurs de blé
Puisqu’on vous tient, fusils de haine !
Tuez ! s’il faut tuer demain,
Ceux qui vous ont mis entre nos mains

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